BOTTI Lou Rosalie (Présidente de COCOVICO): « La beauté d’une femme, c’est son travail »
De petite vendeuse d’attiéké à présidente de la Coopérative des commerçants de vivriers de Cocody (COCOVICO), il y a un grand pas que Botti Lou Rosalie a franchi à force de labeur. Cette femme battante, malgré son niveau CM2 (cours moyens deuxième année), a réussi à se frayer un chemin dans la vie. Aujourd’hui, elle dirige le Réseau des opérateurs économiques du secteur agro-alimentaire de l’Afrique de l’ouest (ROSEAO ), la Confédération nationale des acteurs du vivrier de Côte d’Ivoire (CNAVCI) et est la trésorière adjointe de la Coalition des femmes leaders. Sa persévérance, son courage et sa détermination ont fait d’elle une femme incontournable dans le monde du vivrier.
Pouvez-vous nous retracer votre parcours ?
Je suis partie de rien. J’étais une simple vendeuse d’attiéké-poisson devant le Centre hospitalier universitaire (CHU) de Cocody. En 1993, lorsque le CHU fut fermé pour sa réfection, j’ai décidé de créer une coopérative. A cette époque là, Cocody n’avait pas de marché de vivriers. C’est ainsi que j’ai réuni mes soeurs et toutes les bonnes volontés afin de mieux nous organiser. D’où la création de la Coopérative des commerçants du vivrier de Cocody (COCOVICO) le 4 mai 1995. Au départ, c’était un groupement à vocation coopérative (GVC). Aujourd’hui, nous sommes une coopérative agréée par l’Etat. Diriger les femmes n’est pas une chose facile,
comment vous vous en sortez ?
Evidemment, ce n’est pas chose facile. Mais si tu acceptes de faire partie d’une coopérative, il faut respecter ses règlements. En tant que présidente, je dois accepter les critiques.
Combien de membres comptez-vous et quelles sont les conditions d’adhésion ?
Nous avons 44 membres fondateurs et plus d’une centaine de membres. Concernant l’adhésion, il faut être une commerçante de vivrier vivant en Côte d’Ivoire et exerçant dans le marché COCOVICO. Le droit d’adhésion nous permet de travailler pour la bonne marche du marché. La preuve, vous constatez que le marché d’Angré a changé de visage. Mais avant de construire cet édifice, on a bénéficié d’un prêt que nous sommes en train de rembourser. Pour l’heure, nous avons arrêté les adhésions compte tenu du remboursement octroyé aux membres fondateurs.
Où en êtes-vous avec votre projet d’extension des marchés ?
A Adjamé, par exemple, nous avons une plateforme différente du marché de Cocody. C’est une plateforme pour déverser nos produits avant et de les distribuer. C’est-à-dire qu’après avoir déversé les produits, nous
les envoyons au marché de COCOVICO ou à Koumassi.
Est-ce qu’on peut avoir un bilan …
La coopérative était toute petite à sa création. Aujourd’hui, nous sommes dans un marché moderne. Ici, nous avons des chambres, une salle d’alphabétisation et bien d’autres structures pour le bonheur des commerçants. En somme, le bilan pour l’heure est positif. Mais nous ne sommes pas au bout de notre peine. Parce que nous avons emprunté de l’argent. Notre souci majeur est de le rembourser afin qu’on soit autonome.
Pourquoi ne sollicitez-vous pas une aide extérieure ?
Nous en avons déjà bénéficié.
C’est dire que madame Botti Rosalie ne dort pas…
(Rire) Plus ou moins. Je suis toujours obligée de réfléchir pour l’avancée de notre coopérative. C’est-à-dire voir comment rendre notre marché rentable, organiser les femmes dans toutes les régions du pays etc.
Votre secret pour gérer à la fois votre foyer et votre coopérative quand on sait que les femmes sont souvent obligées de dormir dans le marché pour attendre les marchandises.
C’est toute une organisation. Tous les groupements que je dirige sont repartis en différentes succursales et chacun sait ce qu’il a à faire. Une façon de permettre à chacun de nous de gérer son foyer. J’ai donc le temps de m’occuper de ma petite famille (sourire).
Etre à la tête de plusieurs coopératives, qu’est ce cela vous fait ?
Je me dis que ce n’est seulement à l’école qu’on peut réussir. Si tu crois en ce que tu fais, tu peux réussir. Aujourd’hui, je pense que c’est ma bonne volonté et mon courage qui ont payé. J’en suis fière et je suis très heureuse de faire partie de l’Association des femmes leaders de Côte d’Ivoire. Moi, j’ai le niveau CM2. Cela ne m’a pas empêchée de me battre pour aller de l’avant. Juste pour dire que dans la vie, il ne faut pas être complexé ou baisser les bras parce qu’on n’a pas un niveau universitaire. C’est l’arrivée qui compte. Quand je sors du pays, je discute avec des personnalités, mais avec eux le niveau scolaire importe peu. Le plus important, c’est le travail qu’on fait. Et quand j’échange avec ces personnes, j’arrive à les convaincre malgré mon niveau. C’est ce qui m’a permis en 2004 d’être élue à la tête du réseau africain à partir de mon plan d’action. J’étais candidate avec un Togolais et une Burkinabé qui était déjà à la tête de ce réseau. Mais vu ce que nous avons fait pendant la crise en 2002, ils ont décidé de donner la présidence à notre pays. Pour montrer que c’est le travail qui paie.
Vos conseils aux femmes…
Je les encourage tous les jours et leur fais comprendre que c’est au bout de l’effort qu’on est récompensé. Seul le travail paye. Si vous prenez ce que vous faites à bras le corps, vous allez réussir.
Des projets pour 2013…
Nous envisageons la création d’une plateforme de déversement de produits vivriers à Grand Bassam. Nous avons déjà obtenu le terrain. Vous êtes une référence aujourd’hui en Côte d’Ivoire comme dans la sous région, un conseil
à l’endroit de vos soeurs …
Je demande à mes soeurs de faire quelque chose. Il ne faut pas qu’elles attendent tout des hommes. Ce qui fait la beauté d’une femme, c’est son travail. Elle n’a pas besoin de tendre la main. Surtout qu’aujourd’hui les temps sont devenus difficiles dans notre pays. Après la crise post électorale, beaucoup d’hommes se sont retrouvés au chômage. Il est temps que les femmes entreprennent et se mettent au travail pour pouvoir aider leur époux.
En tant que femme, votre avis sur la coiffure africaine ?
Je suis une fan de la coiffure africaine. Moi-même, j’aime être coquette. C’est la tresse qui valorise les Africaines. Une femme a besoin d’être toujours belle, quel que soit le métier qu’elle exerce. C’est vrai que je suis dans le vivrier, mais il faut que je sois présentable.
Vu votre âge, comment faîtes-vous pour rester toujours belle ?
J’évite de manger la viande rouge et tout ce qui est gras. Je consomme beaucoup le poisson, le poulet. Il m’arrive de rencontrer un diététicien. Côté esthétique, j’utilise des pommades qui ne dépigmentent pas la
peau. Je marche beaucoup.
Florence Edie
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