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Dagri Mandy (PDG de Bati-Décor) : « La décoration ne se fait pas au hasard »

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Patronne de Bati-Décor, entreprise spécialisée dans la décoration et l’harmonisation du cadre de vie, Mme Dagri Mandy est une passionnée de l’art. La singularité du décor ainsi que les couleurs des locaux qui lui servent de bureaux à Cocody  les Vallons, sont l’expression d’un savoir dont elle a bien voulu ébaucher quelques aspects dans cette interview.  

Pouvez-vous nous parler de vos débuts ?

J’ai commencé à travailler très tôt. Entre autres, j’ai été tresseuse,  hôtesse de l’air. Parallèlement à ça, je faisais de la décoration. Mon père faisait de la mosaïque, de la décoration permanente. L’accompagner sur ses chantiers m’a donné l’envie de faire de la décoration.  Seulement que je voulais créer une entreprise dans ce domaine. Etant donné que ça coûte cher, j’ai dû exercer plusieurs métiers pour pouvoir économiser et ouvrir ma boîte. Ayant fait l’Insaac (Ndlr : Institut supérieur des arts et de l’action culturelle), j’ai été enseignante de musique, je joue au saxo. De l’informel, je suis passé en Sarl, ensuite en holding, mais avec la crise, on a régressé.

Pourquoi avez-vous monté une entreprise spécialisée en décoration ?

La décoration est de l’art. C’est une démarche. On ne décore pas au hasard parce que ce métier a ses règles. Mon entreprise vise donc à apporter cette expertise à la société ivoirienne. D’autant qu’à l’époque, il n’y avait pas assez d’entreprises dans le domaine.

Il faut donc une formation pour prétendre être décorateur ?

Absolument. J’ai fait de la décoration intérieure, de l’architecture intérieure, de l’entreprenariat bâtiment et tout ce qui est en rapport avec l’harmonisation des milieux de vie. En dehors de cela, j’ai fait des formations en  management, de la psychologie et bien d’autres. Je continue les études parce que je suis très curieuse.

Même si le métier de décorateur est très connu, il relève encore du domaine informel en Côte d’Ivoire. Avez-vous une solution pour le professionnaliser?

Oui.  Nous avons un centre de formation qualifiante pour les adultes qui ont l’intention de faire de la décoration leur métier. Cette formation dure six (6) mois et permet à tous ceux qui en bénéficient de s’installer et d’exercer professionnellement ce métier. Nous sommes agréés par l’Etat de Côte d’Ivoire. Dans la sous-région ouest africaine, nous sommes le premier centre de formation spécialisé dans ce domaine.

Pensez-vous que le métier de décorateur nourrit son homme en Côte d’Ivoire?

   Oui. Tout le monde a envie de bien vivre. Après le stress de la journée, du travail, des embouteillages, il faut pouvoir se retrouver chez soi dans un environnement  apaisant. De plus en plus, l’on fait attention aux couleurs, à l’emplacement des meubles. L’évolution de la vie et de la société fait que le métier de décorateur s’en trouve valorisé. Il y a beaucoup d’amateurs qui y gagnent leur vie parce que très sollicités. Quelqu’un qui a travaillé toute sa vie pour acquérir une maison, il va sans dire qu’il voudra quelque chose d’unique. Et pour cela, les gens font  appel de plus en plus aux professionnels. Et il y a toujours ce désir de changement. En général, les gens aiment changer leur décoration intérieure. Ce métier nourrit bien son homme.

Dans l’imagerie populaire,  la décoration est une affaire de riches. Qu’en dites-vous ?

La décoration répond à un besoin de vivre dans un environnement sain. J’ai déjà reçu des gens qui, avec 50.000 ou 75.000 francs CFA,  ont pu s’offrir des commodités. La décoration prend en compte l’agencement des meubles, des couleurs pour permettre à l’individu de bien vivre dans son environnement. Il n’y a pas que les nantis qui en ont besoin. Ceux qu’on considère comme des pauvres en ont davantage besoin. On a eu des clients de 50.000 et d’autres de 50 millions de Fcfa. Ce n’est pas réservé aux riches.

En dehors de la décoration, votre entreprise a-t-elle d’autres branches ?

Aujourd’hui, nous ne faisons plus vraiment de la décoration à part quelques anciens clients à qui nous continuons de faire bénéficier de nos prestations. Nous nous concentrons sur la formation. Nous formons à trois métiers. Le métier d’entrepreneur en bâtiment, de décorateur d’intérieur et le métier de décorateur éphémère et  l’organisation d’évènements.  La décoration éphémère est différente de la décoration permanente.

Quelle est la différence ?

La décoration éphémère concerne par exemple, les mariages. L’idée est de sublimer un espace pour un moment précis. La décoration intérieure est plus permanente. On va poser un meuble jusqu’à ce qu’on ait atteint sa durée de vie. Au-delà, nous formons des eventplaner (Ndlr : organisateurs d’évènements). Beaucoup s’improvisent organisateurs de mariage, mais c’est un métier à part entière qui a ses règles qu’il faut apprendre.

 Aujourd’hui de nombreuses personnes continuent de penser que la place de la femme est à la maison pour s’occuper des enfants et des tâches domestiques. Qu’en pensez-vous?

Je vais vous surprendre en disant que c’est le rôle de la femme (Rires). Je suis très féminine, mais pas féministe. La femme a sa part de responsabilité dans le bien-être familial. On peut être chef d’entreprise et s’organiser pour assumer sa part de responsabilité dans les affaires familiales. A la base, dans nos sociétés, c’est la femme qui a la responsabilité d’éduquer les enfants et du bien-être familial. Et ce qui est formidable, c’est que Dieu nous a donné cette force d’assumer ces responsabilités. Et même lorsqu’on travaille en entreprise, il donne toujours cette force de pouvoir allier vie professionnelle et gestion familiale. Ce que les hommes n’ont pas (rires). Il est vrai que certains restent encore dans les préjugés du genre, la femme doit rester à la maison. Je veux bien, mais à condition que l’homme s’occupe de tout. Ce qui de nos jours n’est pas évident. Donc, je crois que lorsqu’on est femme et chef d’entreprise, il faut se donner les moyens et le temps pour s’occuper de sa famille et de son travail.

Vous disiez tantôt que vous avez exercé le métier de tresseuse à un moment de votre vie. Peut-on estimer que la tresse constitue la préférence de Madame Dagri en matière de coiffure?

Je me tresse beaucoup. Dans l’année, je peux me tresser 8 mois. Les tresses constituent pour moi la féminité africaine.

Vous-arrive-t-il à vos heures perdues de tresser ?

Non. J’avais un salon de tresse à Cocody. A l’époque, je cherchais de l’argent pour créer mon entreprise. Je tressais très bien et je gagnais pas mal. Mais aujourd’hui, je ne le fais plus.

Que faites-vous lorsque vous ne travaillez pas ?

Je passe le temps avec mes enfants.

Qu’est-ce que vous aimez manger ?

J’aime beaucoup les sauces feuilles.

Vos instruments de beauté ?

Je me maquille très peu. Je me préfère naturelle. Mais j’utilise du eyeliner.

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