Qui est Janet Yellen, la nouvelle patronne de la banque centrale américaine
Première femme à être nommée à la tête de la Fed, cette Américaine de 67 ans est aussi une économiste brillante, progressiste, qui prône le consensus.
Barack Obama considère celui qui occupe ce poste comme l’un « des plus importants dirigeants politiques au monde ». Et il y a nommé, pour la première fois, une femme. Mercredi 9 octobre, Janet Yellen, 67 ans, a pris la tête de la Réserve fédérale, la banque centrale américaine, plus communément appelée « Fed ». Elle a supplanté, au terme d’une longue saga relatée par Les Echos (lien abonnés), l’ancien secrétaire au Trésor Larry Summers, son principal rival. Ce dernier était notamment contesté pour sa personnalité cassante, ses liens étroits avec Wall Street et ses positions passées en faveur de la dérégulation des marchés. Presque l’opposé de Janet Yellen. Portrait.
Une femme simple adepte de la transparence
Petite femme souriante aux cheveux courts argentés, Janet Yellen est mariée à un économiste de la Fed. Selon Le Monde (lien abonnés), elle est « passionnée de randonnée et de tennis », « adore cuisiner des plats exotiques » et « s’accorde de temps en temps quelques vacances avec son mari et son fils Robert à la mer ».
Côté professionnel, Janet Yellen est notamment partisane d’une plus grande transparence dans la communication des institutions, relève le Wall Street Journal (lien en anglais). Elle est, par exemple, à l’origine de la décision de la Fed d’annoncer, depuis janvier 2012, des objectifs chiffrés d’inflation et de chômage. « A la banque centrale, le personnel s’amusait de voir sa nomination considérée comme le choix de la douceur (…). Elle y fait grincer des dents depuis des années, notamment en incitant inlassablement à adopter une nouvelle politique de communication », relate le HuffingtonPost.fr.
Une personnalité qui fait l’unanimité
En pleine crise du shutdown, choisir la vice-présidente à la Fed depuis 2010 pour occuper le poste de présidente relève du consensus. Démocrate et proche de l’élite économique progressiste, elle a reçu le soutien d’une trentaine de sénateurs démocrates, ainsi que celui de 240 économistes, dont les conseillères économiques de l’administration Clinton Alice Rivlin et Christina Romer. De son côté, le prix Nobel d’économie Joseph Stiglitz, qui a été son professeur, loue sa « grande capacité à forger un consensus ».
« Elle a très peu d’ennemis », abonde le quotidien allemand Frankfurter Allgemeine Zeitung (lien en allemand). « Il n’est pas rare de la voir déjeuner à la cafétéria avec le personnel de la banque centrale américaine », raconte Le Monde, qui la cite : « C’est un bon moyen d’apprendre à quoi les gens pensent, de savoir ce qu’ils ont à l’esprit. J’adore ces échanges. » Et « elle connaît parfaitement la cuisine interne de la banque centrale », note Inna Mufteeva, analyste chargée des Etats-Unis à la banque Natixis, interviewée par le quotidien.
Une « colombe » plutôt qu’un « faucon »
Janet Yellen est plutôt vue comme une « colombe » au sein de la Fed. Un nom d’oiseau qui, dans le langage de la politique monétaire, désigne les décideurs soucieux de croissance et d’emploi, par opposition aux « faucons », plus soucieux de lutter contre l’inflation. « Un père médecin, une mère institutrice, Janet Yellen a grandi à New York, dans le quartier de Brooklyn. Ses parents, frappés par la grande dépression des années 1930 transmettront à leur fille cette peur du chômage de masse », rappelle L’Expansion
Et de fait, elle a toujours soutenu la trajectoire monétaire ultra-accommodante de Ben Bernanke, son prédécesseur, et représente la continuité de cette politique. « Le choix de Janet Yellen va entraîner peu de changements (…). Elle soutiendra peut-être davantage l’emploi et l’économie réelle que Bernanke, mais les différences de politique ne sont pas grandes », estime Robert Wood, économiste à la banque Berenberg.
Cinq ans après la crise de 2008 provoquée par la bulle immobilière et les prêts à risques (subprime), l’économie américaine est encore sous perfusion de la Fed. L’institution veut commencer à alléger ce soutien exceptionnel à l’économie, notamment le rachat, pour 85 milliards de dollars par mois, de bons du Trésor et de titres hypothécaires. Ce que Janet Yellen devrait s’attacher à faire en douceur.
Une fine analyste économique
Connue pour sa méticulosité et son goût de la prévision économique, Janet Yellen sort major de sa promotion en économie à l’université Brown (Rhode-Island) en 1967. Elle réalise ensuite son doctorat sous la houlette de James Tobin, prix Nobel d’économie, à Yale (Connecticut). Et Joseph Stiglitz d’affirmer « qu’en 47 ans d’enseignement, Janet Yellen a été l’une de ses meilleures élèves », selon Le Monde.
Elle est aussi l’une des premières économistes à diagnostiquer une future récession dès la fin 2007. Deux ans auparavant, « alors présidente de la Réserve de la Banque Centrale de San Francisco depuis un an, elle tire la sonnette d’alarme sur le risque de bulle spéculative sur l’immobilier », raconte L’Expansion. De surcroît, selon le Wall Street Journal (lien en anglais), Janet Yellen est, de tous les membres de la Fed, l’économiste qui a produit les prévisions les plus justes entre 2009 et 2013.
Sa nomination doit encore être confirmée par le Sénat.
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