Doffou A. Marguerite (Directrice générale du FNLS): « La lutte contre le Sida est l’affaire de tous »
Doffou Marguerite est la directrice générale du Fonds national de lutte contre le Sida (Fnls), structure étatique chargée de subventionner les actions contre cette pandémie. Levant un coin de voile sur ses activités au Fnls, Marguerite Doffou donne sa vision sur les questions de beauté.
Comment est venue l’idée de créer le FNLS ?
La lutte contre le VIH/sida constitue, aujourd’hui, un enjeu majeur de développement, au regard de l’ampleur des désastres que le Sida cause au sein de nos communautés rurales et urbaines. En effet, notre pays compte environ 360 000 personnes vivant avec le VIH (PVVIH) dont 140 000 sans traitement antirétroviraux et 410 000 orphelins et autres enfants rendus vulnérables du fait du VIH/sida (OEV), selon ONUSIDA 2012. Une réponse efficace à cette épidémie exige de grands moyens qui restent, malgré les efforts du gouvernement ivoirien, encore largement tributaires des financements extérieurs. Ces aides se raréfient au fil des années du fait de la mauvaise conjoncture
économique mondiale. Le FNLS a donc été créé pour d’une part, mobiliser aux plans national et international des ressources additionnelles tant publiques que privées pour le financement des activités de lutte contre le Sida et d’autre part, organiser et développer toute activité nécessaire à la réduction de l’impact du VIH et du Sida en
Côte d’Ivoire.
Comment faites-vous le suivi des projets subventionnés par le FNLS ?
La Sous-direction du Suivi et Evaluation du FNLS est chargée de ces opérations. Elle visite périodiquement les ONG sur le terrain. En dehors de cela, nous avons l’appui du RIP+ (Réseau Ivoirien des Personnes vivant avec le VIH) et du COSCI (Coalition de la Société Civile) qui suivent leurs membres ayant bénéficié de nos financements.
Qui peut bénéficier des financements du FNLS ?
Toute organisation publique, parapublique, privée, non gouvernementale, communautaire menant des activités de lutte contre le VIH/SIDA sur le territoire ivoirien peut bénéficier de nos financements.
Vous avez en projet la Campagne “petite monnaie”. Peut-on en savoir davantage sur ce projet ?
La Campagne petite monnaie est un projet de mobilisation de ressources qui s’adresse aux populations vivant en Côte d’Ivoire. Initialement, ce projet était composé de deux produits : le timbre de soutien à la lutte contre le Sida et le collecteur. Aujourd’hui, nous avons préféré les scinder pour en faire deux grands projets. D’un côté, le projet Timbre de Solidarité qui se présente en plusieurs formats dont la valeur varie de 100 à 100 000 F CFA, offrant ainsi à chaque citoyen, une possibilité d’achat selon ses moyens. Et de l’autre côté, le projet Campagne petite monnaie, qui repose désormais sur la boite et l’urne de collecte. Ces collecteurs servent à recueillir les pièces mais aussi les billets de banque à travers deux ouvertures sur la face supérieure. Ces deux projets sont encore dans leur phase de déploiement et sollicitent l’engagement volontaire de tous. Le FNLS projette de collecter, au moins, 1 milliard de nos francs par an avec le Timbre de Solidarité et 50 millions au moins avec la Campagne petite monnaie pour financer les activités de lutte contre le Sida, selon le Plan Stratégique National (PSN). Si ces projets sont soutenus par l’ensemble des populations, ils nous permettront de résorber en partie le gap financier estimé à plus de 100 milliards F CFA que nous devons rechercher pour les axes stratégiques d’intervention.
Quelle est votre opinion sur la tresse africaine ?
J’apprécie beaucoup les tresses malheureusement on ne voit plus celles des années 60 à 70. Aujourd’hui, on voit plutôt des tresses avec des mèches qui prennent beaucoup de temps pour être réalisées. Ce qui fait que je ne me tresse jamais à cause du temps que cela prend.
Quelle est votre opinion sur la dépigmentation et la chirurgie esthétique ?
Je ne les conseille pas. C’est Dieu qui sait pourquoi et comment il nous a fait telle qu’on est. Je n’aime pas transformer ce que Dieu a donné. Et très souvent la dépigmentation crée un déséquilibre, une disharmonie sur le corps. Ce n’est pas très agréable. Concernant la chirurgie esthétique, j’en entends parler. Si ce n’est pas pour des raisons médicales, je ne peux pas la conseiller. Des femmes se sentent parfois obliger de faire de la chirurgie ou de se dépigmenter pour plaire à leur conjoint. Je trouve anormal qu’un homme puisse demander à sa femme de se transformer pour mériter son amour. Un homme qui épouse une femme doit pouvoir l’aimer telle qu’elle est. S’il préfère un nez fin, qu’il cherche une femme au nez fin, mais il ne peut pas épouser une femme au nez épais et lui demander plus tard de transformer ce nez. C’est impensable.
Quelles sont les difficultés que vous rencontrez dans l’exercice de vos fonctions ?
A priori, je n’ai pas d’encombres dans l’exercice de ma fonction. Par contre dans l’accomplissement de nos missions, nos difficultés sont essentiellement liées à la mobilisation de ressources. Nos attentes à ce niveau sont encore loin d’être satisfaites du fait de la conjoncture économique tant pour les entreprises que pour les ménages qu’on sollicite pour le financement de la lutte. Par ailleurs, à cause des préjugés déjà établis au sein de la population qui pense qu’il y a déjà beaucoup trop d’argent dans la lutte, et qu’elle n’a plus besoin d’apporter sa contribution.
Pouvons-nous avoir un état des financements du FNLS en faveur des bénéficiaires?
De 2007 à 2013, le FNLS a financé plus de 300 projets. 29.000 kits alimentaires, 2.025 kits scolaires et des non vivres ont été distribués au profit des personnes infectées ou affectées et des orphelins et autres enfants rendus vulnérables du fait du VIH et du Sida. Au total, ce sont plus de 50 000 personnes qui ont bénéficié des actions du FNLS.
Certains chiffres laissent croire que le taux de prévalence chez les femmes est plus élevé que chez les hommes. Comment expliquez-vous cette situation?
L’EDSCI 2012 (Ndlr : Enquête Démographique et de Santé à Indicateurs Multiples) nous révèle que de façon globale, les femmes sont plus infectées que les hommes. Cela est dû à la morphologie de la femme, son organe génital est plus réceptif aux infections de par sa constitution, à son niveau socioéconomique (le pouvoir d’achat de la femme est plus faible que celui de l’homme), et à son niveau d’instruction plus faible. Mais, quand on avance dans les tranches d’âges les plus actives, on constate que la prévalence est plus élevée chez l’homme. Par conséquent, je voudrais inviter les femmes à faire beaucoup attention. Qu’elles évitent surtout d’avoir plusieurs partenaires. De même, en allant au salon de coiffure, qu’elles prennent leur propre trousse (Ndlr : aiguilles de tissage, matériels de manucure et de pédicure, lame…). Et dans leur relation de couple, qu’elles prennent la peine de faire leur test de dépistage, à cause des risques auxquelles elles sont exposées.
Anna B.
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